Que faut-il prioriser, les inégalités ou la pauvreté?

6 décembre 2016

Certains confondent la réduction des inégalités et la réduction de la pauvreté. Au Québec, où une loi sur l’élimination de la pauvreté a été adoptée à l’unanimité en 2002 par l’Assemblée nationale, la réduction de la pauvreté est censée être une priorité. Pourtant, malgré d’importants efforts, la pauvreté existe toujours : près d’un ménage québécois sur dix se situe sous le taux de faibles revenus – moins de 50 % du revenu médian[1]. Parmi les familles monoparentales, cette proportion grimpe à un ménage sur quatre.

Si la lutte contre la pauvreté, qui est un objectif noble largement endossé par la population, est une chose, réduire les inégalités en est une autre.  Mais les deux restent intimement liés. En effet, ces deux enjeux résultent le plus souvent des mêmes facteurs et les inégalités alimentent la pauvreté; si votre chaloupe prend l’eau, la vider au fur et à mesure ne réglera pas le problème.

Il existe une forte corrélation entre le niveau de pauvreté et des inégalités de revenus dans les pays développés. Il y a aussi une forte corrélation entre le niveau d’inégalités et la part des revenus captée par le 1 % le plus riche, comme l’illustre le graphique ci-dessous.

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De plus, notons que les pays anglo-saxons (États-Unis, Canada, Royaume-Uni, etc.) ne ciblent que la pauvreté sans s’attaquer aux inégalités. Pourtant, ils ne parviennent à réduire ni l’un ni l’autre puisqu’ils ont les niveaux d’inégalités et de pauvreté les plus élevés parmi les pays développés[2].

La réduction de la pauvreté doit passer par celle des inégalités, ce qui veut dire s’attaquer également à la stagnation des revenus de la classe moyenne et à la croissance importante des revenus élevés. La pauvreté et les inégalités ont un coût très élevé, non seulement en termes de capital humain et de qualité de vie, mais également en termes financiers, un poids supporté par l’ensemble des contribuables. D’ailleurs, les pays plus inégalitaires ont tendance à avoir une classe moyenne plus petite[3]. Bref, mieux vaut miser sur l’égalité.


Références

1. Statistique Canada, « Taux de faible revenu selon le type de famille, ensemble du Québec, 2008-2012 », adapté par l’Institut de la statistique du Québec.

2. Selon les données les plus récentes du Luxembourg Income Study Cross-Country Database (LIS). Bien que les données ne soient accessibles qu’aux chercheurs, on peut trouver les données sur la pauvreté à la page 74 de ce document, ainsi que les données sur les inégalités dans ce texte.

3. Régis Bigot, Patricia Croutte, Jörg Müller et Guillaume Osier, « Pas de classes moyennes sans redistribution sociale et fiscale ? », dans Consommation et modes de vie, CRÉDOC, no 249, 2012.


Ce billet a été d’abord publié sur le blogue Le mirador des inégalités, de l’Institut du Nouveau Monde.

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