Les Libéraux fédéraux souhaitent soulager la classe moyenne en taxant les riches

19 mai 2015

Il y a quelques semaines, ce blogue a analysé une proposition du NPD visant à réduire les inégalités de revenus. Le 4 mai dernier, c’était au tour des Libéraux fédéraux de proposer des mesures censées profiter à la classe moyenne.

Le parti de Justin Trudeau propose de réduire de 22 % à 20,5 % le second palier d’imposition applicable sur les revenus se situant entre 44 700$ et 89 400$, une tranche de revenus au cœur de la classe moyenne. Cette perte de revenus pour le gouvernement serait compensée par l’ajout d’un cinquième palier d’imposition, qui taxerait de 33 % les revenus supérieurs à 200 000$, soit le seuil pour faire partie du symbolique 1% le plus riche. Actuellement, le quatrième et dernier palier d’imposition est de 29 % pour les revenus excédant 138 600 $.

Le Parti libéral du Canada souhaite aussi abolir deux mesures bénéficiant aux parents: la Prestation fiscale canadienne pour enfants et la Prestation universelle pour la garde d’enfants. Elles seraient remplacées par une seule allocation versée sous forme de chèque mensuel.  Le Devoir résume ainsi son fonctionnement:

«Le montant de base sera de 6400$ par année par enfant de moins de 6 ans, et de 5400$ pour tout enfant de 6 à 17 ans. Ce montant diminuera progressivement à mesure que le salaire combiné des parents augmente. À 200 000$ ou plus, les familles ne toucheront plus rien. Toutes les familles avec un revenu combiné de 150 000$ ou moins auront au final plus d’argent en poche qu’avec les prestations conservatrices.»

L’économiste David Macdonald a utilisé le logiciel de simulation de Statistique Canada pour estimer l’effet des mesures proposées par Justin Trudeau sur les revenus des ménages canadiens. Il calcule que celles-ci réduiraient surtout les revenus des mieux nantis, comme l’illustre le graphique ci-dessous:

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Notons toutefois que les plus riches bénéficieraient autant que les autres de la réduction du taux d’imposition pour leurs revenus situés entre 44 700$ et 89 400$.

D’ailleurs, comme le mentionnait le comptable et professeur Pierre-Yves McSween sur son blogue, «l’abattement fiscal québécois réduit l’impôt fédéral de 16,5%. Donc, le taux marginal de 33% pour les revenus de 200 000$ et plus sera de 27,6% en réalité pour un Québécois gagnant plus de 200 000$».

Les propositions de réformes des Libéraux et du NPD diffèrent en termes de gagnants et de perdants. Néanmoins, il semble clair que la proposition libérale réduira davantage les inégalités, puisqu’il s’agit d’un transfert de 3 milliards $ des très riches à la classe moyenne, comparativement à 700 millions $ pour les propositions du NPD, des très riches aux moins nantis.

La bonne nouvelle, c’est que deux des quatre principaux partis politiques fédéraux ont mis de l’avant des propositions concrètes pour réduire les inégalités. La moins bonne, c’est qu’il faudra beaucoup plus de mesures fiscales, économiques et sociales pour revenir aux niveaux d’inégalités que nous avons connu il y a trente ans, comme nous l’expliquions ici. Mais reste que c’est un pas dans la bonne direction.


Ce billet a d’abord été publié sur le blogue Le mirador des inégalités, de l’Institut du Nouveau Monde.